Paris vue de la banlieue, la banlieue vue de Paris

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Makan
“Niggaz in Paris” en référence à cette musique de Jay‑Z et Kanye West qui a fait le buzz durant l’année 2011. Des “renois à Paris” c’est exactement ce que j’ai vécu lorsque je suis entré à la fac de Paris 3 la Sorbonne Nouvelle en 2010. J’ai pénétré un nouveau monde. La journée j’étais dans ce qui me semblait être la lumière lorsque j’allais en cours, et le soir dans ce qui me semblait être les ténèbres lorsque je rentrais chez moi. Je n’ai pas renié mes origines banlieusardes, simplement une nouvelle vie s’offrait à moi avec plus d’opportunités et de nouvelles aventures. J’étais triste de revenir au point de départ, moi qui voulais vivre l’ascension sociale. La vie en banlieue était devenue redondante : foot, musculation, mosquée, voila les trois lieux de socialisation que je fréquentais régulièrement. Pourtant aujourd’hui avec internet je pense que tout est accessible. La vie en banlieue n’est pas restrictive, que ce soit en matière d’apprentissage, de rencontre, d’achats etc…
La première chose frappante à Paris, c’est l’architecture, tellement différente des grandes tours du quartier du Bois de l’étang. Un travail architectural mémorable, d’un style travaillé et raffiné à la fois. Tout de suite l’atmosphère est différente, romantique. J’avais l’impression d’être quelqu’un d’un nouveau statut social, même si je n’avais pas les moyens financiers des parisiens. La seconde chose frappante c’est l’accès aux structures, à portée de main : bibliothèque, magasin, salle de sport, banque etc…

Jean

Paris, la plus belle ville du monde, la ville lumière qui brille jour comme nuit. Pourtant dans certains quartiers, cette lumière s’éclipse. Je dirai qu’il y a trois classes sociales représentés dans Paris Intra-muros : ‑L’élite, une minorité qui vît dans des appartements de 200 m², des palaces, des duplexs et des grands hôtels particuliers où j’arrive parfois à m’infiltrer avec ma bande de zoulous le samedi soir. ‑La classe moyenne, sûrement la plus représentée, souvent appelée bobo, ce sont des gens qui vivent bien, ils partent au ski pendant les vacances d’hiver et à la mer l’été. Ils peuvent s’habiller en marque et prolonger leurs études facilement. – Puis il y a les prolétaires, ceux qui habitent dans des H.L.M, qui partent en vacance avec la CAF, qui passent leurs étés au centre aéré… Ceux qui connaissent le chômage, qui sont caissier ou caissière, agent de la propreté et même profs (dans certains cas chez les profs, il y a une réelle précarité).

Moi, je connais ces trois classes, étant fils de deux smicards, une mère surendettée, qui attendent depuis trop longtemps leur H.L.M ; j’ai pu voir de tout dans le 15ème. Cette arrondissement est varié, plein de surprises et de contradictions. Il y a par exemple trois cités : la cité Falguière ( tout proche de là où j’habite), la cité Péricho situé vers Brancion proche de porte de versailles, et il y a la cité bleue qui est en face de l’Aquaboulevard. Pourtant aucune famille qui y habite n’a les moyens d’y aller. Puis tout proche de ces cités, il y a le siège de l’UMP, de grands immeubles haussmanniens, des résidences de luxe… Pourtant ce qui est formidable, c’est que les enfants de tous les milieux, se retrouvent dans les mêmes lycées, les mêmes écoles et forment des cliques qui comportent des fils de patrons et des fils d’ouvriers. Un mix qui marche bien mais qui parfois se confronte. Car oui parfois l’argent suscite de la jalousie chez certains. J’ai déjà assisté et un petit peu participé à des bagarres entre bourgeois et prolétaires, je vous laisse deviner de quelle côté j’étais et qui a gagné. Mais le phénomène le plus marquant, c’est que dans un quartier dont je ne donnerai pas le nom pour ne pas qu’ils aient des ennuis, il y a des résidences H.L.M et des résidences de luxe placées côte à côte, où certains, voulant vivre comme les résidents plutôt riches, ont organisé un trafic de drogue très fleurissant, qui fournit un grand nombre de personnes. Voila, tout cela pour dire comme la MZ ” Paris connais aussi la hess” ( un très bon groupe de rap du 13ème arrondissement) mais c’est juste que cette hess est un peu cachée par les lumières des grands magasins.

Makan

Esprit parisien esprit banlieusard, il y a des points divergents et des points convergents. Convergents : Il y a unanimité sur les préjugés que chacun porte sur l’autre. En effet les différences sont marquées. Toutefois, il ne faut pas généraliser. Il est possible de rencontrer dans les rues de Paris un jeune homme de famille aisé adoptant des stéréotypes de quelqu’un venant du quartier. Il a dû regarder la T.V, écouter du rap français, ou il a quelques amis en banlieue (?). Au contraire, il est possible aussi qu’un jeune homme de quartier se comporte comme un parisien, car il aura fait des études à Paris, ou qu’il aura rencontré de nouvelles personnes. Cependant il existe une différence à plusieurs niveaux :

Style vestimentaire : même si il y a des échanges interculturels à la marge, les styles restent quand même homogène. Il est ultra fréquent de rencontrer l’homme du quartier avec son survêtement et ses baskets et l’homme de Paris son jean skinny avec et sa longue veste.
Le mode de pensée : dans les familles aisées parisiennes on parle plus aisément dès le plus jeune age de littérature, de philosophie, d’études et de business alors que dans une famille de quartier il y aura une tendance à parler de l’Afrique, de la famille, de la religion. Et même entre jeunes si certaines personnes du quartier pensent à leur avenir dès leur plus tendre enfance, les sujets de conversation ne seront pas les mêmes.
L’attitude, la démarche sera plus fluide, plus élancée chez le parisien et plus saccadée, plus dansante, de gauche à droite, chez les banlieusards.
La langue, l’usage du “wesh” avec une voix assez grave, alors que le parisien aura une voix plus douce et détendue.

Jean

Sinon, l’esprit parisien ou l’esprit banlieusard, je pense que cela n’est pas vraiment défini. Et puis cela dépend du milieu où l’ont vit et avec qui on a grandi. Je pense que l’esprit banlieusard de Neuilly sur-seine (car oui Neuilly, c’est la banlieue) n’est pas le même que celui de la Courneuve. Après ma version de l’esprit banlieusard, en tant que parisien, c’est que le banlieusard ne lâche jamais, se bat pour s’en sortir malgré les obstacles, il n’abandonne jamais tel un Saiyen. Mais cet esprit tu peux aussi le retrouver à Paris. J’ai des amis qui sont dans la merde financièrement et familièrement mais qui pourtant ne lâchent rien à l’école. Puis venons aux mentalités. Mes parents ne sont pas des briseurs de rêves mais mon entourage ou les conseillères d’orientation le sont, oui. Parler de littérature, de politique… Moi qui lis, je ne le mets pas trop en avant. Quand je vais au musée (j’en profite les musées sont gratuits pour les moins de 18 ans à Paris) , je ne le manifeste pas à mes potes.

Makan 
Dans cet univers parisien mon style à changé. Je suis parti chez Zara durant les soldes et j'ai refait ma garde robe. J'ai changé ma manière de parler en essayant d'employer un vocabulaire plus élaboré mais parfois à la fac on me faisait des remarques du style " ça se voit que tu viens d'un quartier" à cause de ma manière de parler.
Finalement avec le recul je dirai que j'ai été influencé plus que transformé, car si je suis resté un banlieusard, j'ai acquis naturellement une pensée différente par le contact avec ce nouveau monde. Ceci est d'ailleurs évidemment valable pour toute personne qui fréquente un nouveau groupe.
Au final, pour moi, Paris était un rêve, celui de se poser le dimanche matin sur une terrasse avec une belle brune à ses cotés, discutant de tout et de rien mais surtout d'amour et de projet de vie. Paris c'est la capitale de la mode, du business et de l'amour. Une véritable réussite pour ceux qui auront dans leur vie la capacité de s'installer dans ce monde de premier plan.

Jean
Avec mes amis, on parle comme tous les jeunes de foot, filles, musiques … Pourtant, parfois j'entends des phrases comme : " Quand les huissiers viennent à la maison, je cache la PS4" ou " Un grand s'est fait schlassé". Donc à Paris, tout n'est pas rose, cela peut être sombre aussi. Le cliché du parisien riche et blanc est faux. Aujourd'hui le parisien est cosmopolite et de toutes classes sociales.
On peut conclure qu'être de Paris ou de banlieue importe peu pour les relations entre nous. Regardez, nous sommes la preuve même qu'un parisien et un banlieusard peuvent rapidement sympathiser et travailler ensemble.
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Infos de l'auteur

Habitant du quartier du Bois de l'Etang à La Verrière, ancien étudiant à la Sorbonne Nouvelle en Licence Langue Littérature et civilisation, écrivain à mes heures perdues, amateur de philosophie, de spiritualité et du monde de l'entreprise. A travers ce blog je souhaite favoriser de nouvelles initiatives dans le quartier.