Assa pour un back to bac ancienne version


Assa Dicko, lycéenne de 18 ans en classe de Terminale générale au lycée de la plaine de Neauphle de Trappes vient de passer ses épreuves de spécialité du bac avec la nouvelle réforme, et se projette vers ses études supérieures après un passage par Parcoursup. Retour d’expérience.

« Franchement, je trouve pas que ça soit mieux, dans le sens ou ça laisse les élèves livrés à eux même » s’indigne Assa, lycéenne en classe de terminale au lycée de la Plaine de Neauphle de Trappes, quand elle pense à la réforme du lycée ayant mis fin aux filières S, ES, L.

Si l’éducation nationale a mis en place cette réforme, pense la lycéenne, c’est pour que les élèves aient plus de liberté dans le choix des matières de spécialité. Mais cette liberté, Assa la perçoit comme un inconvénient, car sans les anciennes filières, « c’est pas structuré ».

Au point que, elle qui a réussi à intégrer une filière générale, en vient à penser préférable de choisir une filière technologique, par exemple STMG ou ST2S car « c’est bien plus structuré que la filière générale ». Même si elle trouve que, de manière globale, elle a bien été accompagnée par ses profs, Assa aurait voulu faire partie des élèves d’avant la réforme des filières. Elle aurait alors choisi la filière ES, pour son côté général et complet, donnant accès à de nombreuses filières pour les études supérieures.

Par exemple, explique-t-elle, dans sa classe de terminale certains de ses camarades ont choisi des matières de spécialité qui n’ont rien avoir entre elles, « SES et SVT ou SES espagnol » afin de se donner le plus de chance d’obtenir le bac grâce à leurs matières fortes « En fait on choisit nos matières parce qu’on les aime bien » avoue-t-elle. Mais au prix d’avoir laissé tomber des matières importantes pour la réussite des études supérieures, ou bien d’affaiblir son dossier sur Parcoursup, la plateforme censée répartir selon leurs mérites les lycéens dans les différentes filières des études supérieures.

Ce flou est dû au fait que dès la classe de seconde, « au deuxième trimestre on nous demande ce qu’on envisage de faire comme filière », générale ou technologique. Et puis, à ceux qui veulent aller à en filière générale, comme Assa, on demande les trois matières de spécialités qu’ils souhaitent suivre en première, en vue de n’en garder que deux en terminale. Au risque, surtout si on n’est pas accompagné, de se tromper sur cette première orientation.

En première, Assa a choisi « Histoire-géographie, géopolitique et sciences politiques (HGGSP), Science économique et social (SES) et anglais » et en terminale elle a gardé HGGSP et SES car « j’étais moins forte en anglais que dans les deux autres matières » avoue-t-elle. Pas trop grave de ce côté-là en matière de formation, puisque par ailleurs l’anglais reste toujours dans le tronc commun.

T’as ta classe pour le tronc commun, genre le français, les langues, histoire et enseignement scientifique. Et pour les spécialités, t’es avec d’autres élèves d’autres classes qui ont choisi les mêmes matières

Un exemple de ce risque de mauvais choix faits parfois seuls par des adolescents de quinze ans concerne les mathématiques, qui, avec la nouvelle réforme, peuvent être arrêtées en seconde. Les élèves peuvent les choisir en option « mais il faut que le créneau corresponde à ton emploi du temps » précise-t-elle.

Un inconvénient, pour la lycéenne, puisque que « les maths c’est quand même important » pour intégrer de nombreuses formations dans le supérieur, à la fac et dans d’autres filières. D’ailleurs, Assa trouve que c’est une bonne chose le fait que l’éducation nationale songe à les remettre dans le tronc commun « j’espère qu’ils vont le remettre. Si on a des épreuves obligatoires en français pourquoi ne pas en avoir en maths ? », se demande-t-elle.

Plus problématique au quotidien, la réforme a changé la socialisation des élèves. En effet, les élèves ne sont plus répartis en fonction de filières, qui n’existent plus, mais selon les spécialités choisies. « T’as ta classe pour le tronc commun, genre le français, les langues, histoire et enseignement scientifique » explique Assa. Et ensuite, pour les spécialités « t’es avec d’autres élèves d’autres classes qui ont choisi les mêmes matières » regrette l’adolescente.

A la rentrée, Assa appréhendait un peu cette répartition des classes parce que « je me suis dit : « je vais devoir me faire des amis dans chaque cour pour les travaux de groupe » » même si elle ne va les voir que deux heures par semaine, pour certains.

Autre effet de la réforme vécu par Assa, le changement de calendrier de passage des épreuves. La plus grande partie du bac se passe dorénavant en mars. Mais « 6 mois pour préparer le bac, c’est très peu » regrette la future bachelière, qui aurait préféré le passer en mai ou en juin, comme avant. Car « mars c’est vraiment tôt. Nous on a eu qu’un seul bac blanc pour se préparer », psychologiquement notamment. Même si elle s’en est sorti pour les épreuves de spécialité, dont les résultats sont tombés il y a quelques jours, parce qu’« en HGGSP, j’avais presque le même sujet qu’au bac blanc : comment préserver le patrimoine. »

Mais une fois ces premières épreuves passées, pas facile de se remobiliser. « Le bac, il est fini. On va se concentrer sur le grand oral et les autres matières » explique Assa, sans s’apercevoir que le grand oral fait partie intégrante du bac, tellement les dates de passage des épreuves sont éloignées les unes des autres.

Conséquence : depuis la fin des épreuves de spécialité, le taux d’absentéisme dans son lycée a augmenté au point que la conseillère principale d’éducation, en charge de l’ordre dans l’établissement, a envoyé un message sur Pronote, le logiciel de partage d’information entre le lycée et les élèves, pour rappeler aux élèves que les cours n’étaient pas finis, et que l’assiduité et les appréciations des profs comptent pour les universités et donc pour Parcoursup.

les notes obtenues en contrôle continu ne comptent pas pour le bac, admet Assa. Mais il se peut que sur Parcoursup, les écoles et les universités regardent les notes obtenues

Face aux effets de ce calendrier remanié, le lycée en est ainsi réduit à jouer la carotte pour essayer de motiver les élèves. Car « les notes obtenues en contrôle continu ne comptent pas pour le bac, admet Assa. Mais il se peut que sur Parcoursup, les écoles et les universités regardent les notes obtenues » tout au long de l’année, explique Assa, relayant le message du lycée.

Ça sera encore plus difficile de motiver les élèves depuis que les résultats des épreuves de spécialités sont sortis, mercredi dernier. Car, selon Assa, en gros, « c’est là qu’on sait si on a le bac ou pas. » Pourtant, il reste le grand oral et l’épreuve de philo à passer, plus tard, à la fin du mois de juin…

En plus, sur internet, des simulations ont permis, depuis plusieurs semaines, aux lycéens d’anticiper s’ils ont le bac ou pas en mettant les notes de français obtenues en première et les notes qu’ils pensaient obtenir dans les autres matières au mois d’avril. Difficile de ne pas attendre la fin de l’année en dilettante quand les jeux semblent faits non plus en juin, mais en avril. « Tu tapes « simulation bac », et t’as plein de sites qui font ça ».

Du coup, un écart se creuse entre l’attente des élèves qui n’ont que le bac à l’esprit et les enseignants qui doivent poursuivre leur programme jusqu’à la fin de l’année. Pour le grand oral, qui consiste pour un jury à choisir une des deux questions choisies par les professeurs de spécialité que le candidat devra traiter après vingt minutes de préparation, Assa avoue n’avoir pas beaucoup d’informations « On sait juste qu’on doit trouver des questions et après les profs vont nous aider, mais on n’a pas vraiment d’indication sur le déroulement de l’épreuve » raconte-t-elle.

Finalement, le seul point positif qu’Assa retient de la réforme, c’est « qu’on a moins d’épreuves ». Et le fait de pouvoir choisir les matières sur lesquelles être évaluée.

Si les élèves ont aussi la tête ailleurs qu’au programme à boucler avant la fin de l’année, c’est que certains problèmes qui les tracassent ne sont toujours pas résolus concernant l’orientation post-lycée. Assa, comme beaucoup d’autres, s’inquiète de son orientation via la plateforme Parcoursup, ouverte depuis le mois de janvier. Parce qu’elle n’a pas de visibilité sur les formations qui l’accepteront, et parce qu’elle ne sait encore bien si ses choix faits sont les bons.

Au premier trimestre de la terminale, les élèves du lycée de la plaine de Neauphle, ont reçu une fiche à remplir avec leurs parents pour savoir ce qu’ils aimeraient faire après le bac. « Moi j’avais mis que je voulais faire une licence ou un BUT » détaille-t-elle, un bachelor universitaire de technologie (BUT), nouvelle formation en trois ans, donc niveau licence, au lieu de deux pour les DUT qu’elle remplace.

Je me suis dit : « comme j’ai droit à dix vœux, je vais mettre dix vœux, même si c’est pas vraiment ce que je veux faire »

Pour accéder à la plateforme Parcoursup, Assa a eu la chance d’être accompagnée par ses profs principaux, lors d’une cession dans une salle avec des ordinateurs pour leur expliquer comment fonctionne la plateforme et pour les aider à s’inscrire. Mais tout le monde n’a pas eu cette chance précise Assa : « Je connais des gens qui n’ont pas eu cet accompagnement-là » témoigne-t-elle.

Un peu perdu parmi la richesse de l’offre sur Parcoursup, Assa a mis un peu de tout. « Je me suis dit : « comme j’ai droit à dix vœux, je vais mettre dix vœux même si c’est pas vraiment ce que je veux faire » ». Elle souhaiterait être acceptée en BUT gestion administrative et commerciale des organisations à Rambouillet, le seul BUT pas trop loin de Trappes. Cette formation pas trop spécialisée, qui s’effectue en trois ans, lui laisserait le temps de savoir ce qu’elle aimerait faire plus tard, grâce aux stages notamment.

Sans trop pouvoir se projeter non plus, puisque de nombreux élèves se retrouvent finalement sans aucune formation les acceptant, ou bien avec une formation qui ne leur plait pas vraiment. Et, ce, tout en appréhendant la différence de la charge de travail possible entre lycée et études supérieures parce qu’« au lycée on nous apprend pas vraiment à être autonome, les profs sont vraiment derrière nous. » Autant dire que nombreux sont dans le flou.

Une fois les premiers choix effectués par les élèves, les profs donnent leur avis lors du conseil de classe, après avoir regardé s’il y a bien une logique entre les formations choisies et les notes des élèves. « Moi ils m’ont dit que pour la licence c’était « reservé », ce qui veut dire que je peux être prise en licence, mais que je dois travailler plus » explique-t-elle. « C’est juste comme des conseils. »

Car comme d’autres, Assa trouve que la plateforme est mal faite. « On est là on met nos vœux, on espère être pris dans telle ou telle formation, on n’est pas sûre d’être pris, après on met d’autres vœux qui nous plaisent moins et même ça, on n’est pas sûr d’être pris ». La phase d’admission de Parcoursup est en juin, après la fin de ces dernières épreuves du bac qui semblent si loin.

Finalement, ce qu’elle reproche de cette sélection à la Parcoursup, c’est le côté aléatoire des affectations mais aussi le manque de places dans les universités. « Mes profs m’ont dit qu’ils restaient à notre disposition pour la phase complémentaire, si nous n’avons été acceptés nulle part » tente-t-elle finalement de se rassurer.

Kandia Dramé


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