Fort de son engouement à travers la France entière et l’Europe (Royaume-Unis, Allemagne, Espagne, Portugal, Belgique…), Nuit Debout n’avait pas encore fait son entrée dans la banlieue versaillaise. C’est chose faite ! Le mouvement né place de la République à Paris a fait sa première à Saint-Quentin en Yvelines le 16 avril dernier. Nous y étions !
Nous nous sommes donnés rendez-vous à l’entrée du Parc des Sources de la Bièvres à Guyancourt, devant la Bibliothèque Universitaire de l’Université de Versailles-Saint-Quentin. J’arrive vers 19h50, un petit groupe s’est déjà rassemblé autour du bassin de Marta Pan où a été disposée une planche de bois sur deux tréteaux, en guise de table. Elle sert de support pour un ordinateur, un micro relié à un petit ampli posé à même le sol et à une ribambelle de câbles. Antonin lance la vidéodiffusion sur internet d’un cri enthousiaste, Il s’approche de moi pour une micro-interview : « Alors le Trappy’Blog ?! » s’exclame-t-il. L’ambiance est détendue, bon enfant. Le groupe s’est agrandi : élus locaux, militants politiques, étudiants ou simples habitants, chacun est venu s’exprimer en son nom propre. Une quarantaine de personnes prend place sur les marches de la place pour ouvrir la première assemblée générale Saint Quentinoise : il est vingt-heure.
Une jeune femme brune prend le micro et ouvre l’assemblée. Elle rappelle la genèse du mouvement Nuit Debout. A Saint-Quentin en Yvelines c’est un groupe de jeunes gens qui est à l’initiative du mouvement, l’idée faisant son chemin depuis quelques jours sur les campus étudiants et lycéens. Elle rappelle également l’utilisation et la signification des gestes, un code de langage citoyen qui permet de dire si on est d’accord ou pas, si on s’oppose radicalement (auquel cas une contre-proposition doit obligatoirement être faite), si une prise de paroles est trop longue, ou un sujet déjà trop traité, ou s’il faut parler plus fort. Le premier tour de parole est lancé sur un thème simple et ouvert : Pourquoi sommes-nous venu à Nuit Debout et qu’attendons-nous de ce mouvement ? Les réponses sont multiple. C’est en général l’envie de se réunir suite à la loi Travail et, vue l’ambiance générale du pays, l’envie de reprendre possession des rues et places publique. Mais c’est aussi l’envie de voir ce qu’est Nuit Debout en vrai plutôt que de rester devant sa télévision. L’idée que ce rassemblement citoyen ne soit pas une finalité s’impose très vite et des propositions sont mises sur la table : occuper la Société Générale, œuvrer pour la séparation du Medef et de l’État… Je prends le micro à mon tour et j’explique que j’ai d’abord voulu retranscrire sur le Trappy’Blog ce qui se passe, ici, ce soir et que je voulais aussi vivre en vrai une Nuit Debout. Chaque fin de prise de parole est applaudie.
Avec ce tour de parole la démocratie directe fait son œuvre et chacun respecte un temps de parole de 3 minutes. Viens le temps des propositions, les décisions se votant au consensus. Cinq commissions sont mises en place lors de cette première soirée : Campement, alimentation, logistique, communication et actions. Une première action concrète est adoptée : écrire sur un papier son ressenti quant au rassemblement et accrocher ce bout de papier sur soi avec une pince à linge. Un des membres court à l’hypermarché pour acheter ces pinces. Pendant ce temps, d’autres décisions sont prises : sur cette même place, il y aura un micro ouvert tous les jours à partir de 18h00 et une assemblée générale aura lieu chaque samedi à partir de 18h00. Alain Hajjaj, ancien maire de La Verrière, prend la parole brièvement et explique que pour être efficace il faut éviter de faire de l’entre soi. Sa remarque est approuvée par l’assistance. Nous évoquons également la nécessité d’organiser des Nuit Debout dans d’autres lieux de SQY. L’assemblée est suspendue une heure, le temps de se répartir en commission.
Les commissions, c’est le temps de discuter et décider des moyens et de la manière dont va vivre Nuit Debout à Saint-Quentin. Matériel, lieux, vivres… tout y passe et tout est décidé par vote. La forme et la nature des actions sont également discutées : Actions violentes ? Actions non violente ? Violence matérielle ? Violence humaine ? Définir le mot violence nous-même ou s’appuyer sur les textes de loi ? La question de l’organisation du campement est également mise sur la table : Où ? Quand ? Comment ?
L’Assemblé Générale est ré-ouverte à 22h00. Chaque rapporteur de commission liste les propositions retenues. Cela donne lieu à des débats parfois passionnés. Il a été décidé que Nuit Debout SQY fera des actions non-violentes avec une petite précision : le collage d’étiquette sur les panneaux est reconnue par la loi comme dégradation matérielle. Que faire en l’espèce ? Ce point n’est pas complètement tranché. Aucune action n’a été décidée, le campement sera le lieu de plus amples discussions. Une organisation pour l’apport de matériel et de vivres se met peu à peu en place. En matière d’alimentation, les courses et la récup’ seront les modes d’approvisionnement privilégiés, mais un appel à l’initiative personnelle est par ailleurs lancé ! Quant à la communication, si il est interpellée par des journalistes chacun parle en son nom propre pas en celui de son parti, syndicat ou même association et encore moins au nom de l’assemblée. Enfin, tout le monde se doit d’être responsable et laisser la place propre pour éviter de souiller l’image du mouvement.
Si tous semble encore un peu brouillon ce soir, c’est normal car c’est une première. Mais il ne fait aucun doute que tout sera en place très vite et que les rues et places de Saint-Quentin en Yvelines deviendront le théâtre de véritables assemblées citoyennes ! D’ailleurs, Nuit Debout se poursuit dès le lendemain à 18h00 au même endroit et rendez-vous est donné à La Verrière dès la semaine prochaine.
Tristan Péribois