Arrivés à l’aéroport de Damas nous nous sommes faits escroquer mais ceci est anecdotique. Nous avons cherché un hôtel mais il n’y avait plus de place nulle part. Finalement, nous avons pu trouver une place dans une auberge de jeunesse ultra pas très propre, et dans laquellle nous étions serrés comme des cafards. Une fois en ville, j’ai troqué mon jean pour une Jellaba et je me suis inscrit à l’université d’été de l’institut Abou Nour qui donnait des cours d’arabe renforcés. J’ y ai assisté quelques temps puis j’ai fini par me diluer dans l’ambiance syrienne et mis l’essentiel de mon apprentissage sur l’application quotidienne à travers le dialogue avec les syriens. Il faisait chaud, les routes souvent embouteillées, les rues pleines de passants, mais l’ambiance était douce. Là-bas, j’avais le désire de me marier avec une Syrienne parce que j’étais amoureux du Moyen-Orient, et j’avais envie de pratiquer l’arabe dans mon ménage. J’ai rencontré une fille avec laquelle j’ai perdu actuellement le contact.
Quelques jours après notre arrivée à Damas, nous avions du mal à trouver un appartement, mais des amis avaient trouvé un contact Français qui nous aida à trouver un appartement peu cher, en haut d’une montagne. Un homme qui suivait la Sounna, au regard de son apparence. Nous avons fini, mon ami et moi, par nous installer en haut de la montagne. Puis, avec le temps, cet homme et moi commençâmes à nous rapprocher et à nous lier d’amitié, plus qu’avec les autres personnes présentes, ou avec mon colocataire. Mais petit à petit, au fur et à mesure que cet homme m’aidait, m’accordait de petites attentions, il me parlait de Ben Laden, de la guerre, qu’est ce qu’un vrai et faux salafi etc… il ne m’a jamais dit concrètement ce qu’il faisait en Syrie, mais je sais qu’il y était avec sa femme depuis 5 ans. Avec le temps, j’ai commencé à comprendre qu’il partageait la croyance de ce qu’on appelle aujourd’hui un Jihadiste . Mais cela n’a jamais remis en cause mon amitié pour lui, car au-delà de cela il m’apportait son aide dans énormément de choses, et puis il était de bon caractère. Puis, un jour énervé contre les syriens à cause du racisme ambiant, je m’énervai. Il me dit de me calmer, qu’il n’y avait aucun intérêt à agir de la sorte puisque ce pays allait bientôt ” péter “. Trois ans plus tard la guerre faisait rage…
Je voudrais en profiter pour aborder un sujet que j’ai désormais intériorisé aujourd’hui, mais qui m’a fait beaucoup de peine à l’époque : la situation de l’homme noir dans l’empire arabo-musulman. Il est intéressant de voir à travers l’histoire et la culture que le noir est parfois dévalorisé dans la civilisation arabe. Je vais citer une anecdote personnelle et des exemples tirés de l’histoire et de la littérature. En ce qui me concerne je marchais dans les rues alors que des hommes en groupe m’aperçurent, me traitèrent de « chocolat » et se mirent tous à rire… Malheureusement l’histoire du compagnon du prophète Bilal, exemple assez probant ne suffit pas à exhorter les esprits, à l’instar du livre des mille et et une nuits qui montre une image désastreuse de l’esclave “nègre”. Je peux également parler de la révolte des esclaves dit “zanjis” qui a eu lieu entre 869 et 883 sous le califat abbasside, dans le sud de l’Irak actuel. Les conditions des esclaves noirs devenus insupportables, ils décidèrent de s’insurger. Par la suite la révolte fut écrasée. Il est important de noter que lorsque je parle de racisme, je ne parle pas de faits isolés. Je parle bien de conditions de vie moins bonnes et d’une image ancrée dans les esprits des noirs vivant au Moyen-Orient. Conditions que j’ai vues, et dont j’ai parlé avec des noirs de Syrie et de Mauritanie.
J’ai aussi discuté de cette réalité difficile avec des amis. Certains nient cette situation, d’autres l’avouent à demi-mots. Personnellement, ça a été pour moi le début du déclin de ma passion sulfureuse pour cette langue et cette région du monde. Cela a été la cause pour moi d’un repli sur soi et d’un intérêt nouveau pour la culture noire africaine. J’ai commencé à me poser plus de question sur l’Afrique noire et à imaginer d’autres projets.