C’est dans une salle du centre social Michel Luxereau, à Trappes, que je participe deux fois par mois aux réunions du Trappy Blog. Mais qui était ce Michel Luxereau ? C’était mon arrière grand-père mais je ne savais pas qui il était, je ne connaissais pas son histoire. J’ai demandé des réponses à sa fille. Ma grand-mère Annie.
Rien ne prédestinait Michel Luxereau à vivre à Trappes. Ce grand brun vivait à l’origine dans le Loir-et-Cher avec sa famille, où ses parents étaient instituteurs et directeurs d’école. Il a été élève au lycée de Chartres puis a fait des études de Médecine à Tours. Annie, ma grand-mère me raconte : « Il s’est installé à Trappes dans les années 30, rue Gabriel Péri », en face de la gare actuelle. À l’époque, Trappes était une petite ville de quelques milliers d’habitants, en développement. Aujourd’hui, on en dénombre plus de 30 000.
Dans les années 30, il n’y avait qu’un seul médecin, le docteur Burgard. Mon arrière-grand-père faisait des remplacements dans le département. Le docteur Burgard étant malade et ne pouvant assurer les soins de toute la ville, Michel a travaillé en tant que second médecin de Trappes. « Il s’est marié avec ma mère Madeleine Mansion, une de ses anciennes patientes, en 1933 », glisse Annie en souriant. Il achète alors la maison au 18 rue Pierre Sémard. Cette maison est aujourd’hui le centre de loisirs Pierre Sémard.
“Un médecin à l’écoute de la situation familiale et économique de ses patients”
Michel Luxereau, né en 1906, était le seul garçon de la fratrie. Sa petite sœur, Jacqueline, à 96 ans, est toujours en vie. Mais sa grande sœur Jeanne est décédée d’une typhoïde à l’âge de 13 ans. « Ça l’a profondément choqué, il en parlait peu », m’apprend Annie. Ce n’est pas le seul. Leur père a été blessé pendant la Grande Guerre, et a été rapatrié à Marseille. Il n’a pas pu rentrer à temps pour assister aux derniers jours de sa fille, Jeanne. C’est peut-être de cet épisode que vient sa volonté de soigner les autres.
Le docteur Luxereau, qui a fait toute sa carrière à Trappes, « avait la réputation d’être un médecin à l’écoute de la situation familiale et économique de ses patients », selon Annie. C’est qu’à l’époque, le médecin avait un rôle social qui dépassait son rôle actuel. Il pratiquait notamment beaucoup d’accouchements, souvent à domicile. Mais il a aussi participé au développement de la Protection maternelle et infantile, la PMI, en relation avec une infirmière, Mme Moro. Et il s’est engagé dans le réseau de prévention de l’alcoolisme avec les Alcooliques Anonymes.
Un “coup de main” aux Résistants
Au début de la Seconde Guerre Mondiale, Michel Luxereau a été mobilisé en tant que médecin dans un train sanitaire, qui évacuait les blessés. Puis au moment d’être démobilisé il est revenu à Trappes où il est resté pendant le reste de la guerre. Annie me confie : « Il ne s’est pas engagé formellement auprès des Résistants, mais leur donnait régulièrement de sérieux coups de main ». Des soins médicaux par exemple. Vivre la guerre à Trappes était particulièrement dangereux. A la fin de la guerre, les alliés bombardaient les lignes de chemin de fer pour contrecarrer l’acheminement de renforts sur la Manche. Plus de 70 % de la ville de Trappes a été touchée par ces bombardements, et notamment la gare de triage qui était la cible principale. « La maison qui était à proximité a survécu. On ne sait pas vraiment comment, car les bombes tombaient tout autour, en masse », m’explique ma grand-mère.
Puis, après la guerre, Trappes s’est développée. D’autres médecins sont arrivés. « Il a pris sa retraite et mis une partie de la maison à disposition de plusieurs familles de réfugiés vietnamiens et cambodgiens, dans les années 70 et 80 », déclare-t-elle. Il a aussi participé au recueil organisé par le service Mémoire de Trappes sur la vie de la ville avec un instituteur, Monsieur Bayeux. Michel et Madeleine ont eu 4 enfants : François en 1936, Philippe en 1938, Annie en 1942 et Yves en 1943. Annie, ma grand-mère, a eu 2 enfants dont Jean-Maxime, mon père, né au Niger en 1969. Michel Luxereau est décédé en 1992. Mais il a laissé une trace dans l’histoire de Trappes. Et surtout, il a donné son nom au centre social dans lequel je participe aux réunions du Trappy Blog !