Le Trappy Blog, représenté par Makan, Mehdi et moi-même, était invité le 21 mai dernier à une nouvelle école du Blog. Nous avons retrouvé dans une atmosphère toujours conviviale l’équipe du Bondy Blog dans ses locaux. Notre invitée était Patricia Loison, journaliste au parcours très riche et engagée auprès des jeunes avec lesquels elle souhaite faire part de son expérience de journaliste. Après avoir intégré l’ESJ en 1993, après deux ans de prépa littéraire, elle a débuté sa carrière journalistique en présentant les locales de France 3. Puis elle fait le grand saut et rejoint LCI, où elle a été journaliste spécialisée en politique étrangère durant 10 ans, période qu’elle considère comme « une formation accélérée formidable ». Elle est ensuite passée sur I‑Télé en 2005, où elle a présenté pendant 5 ans un magazine consacré à l’actualité étrangère, « Un jour dans le monde ». Elle a enfin présenté durant deux ans l’émission « Faut pas rêver » après le départ de Laurent Bignolas. Cela fait maintenant 5 ans que la journaliste est aux commandes du « Grand Soir 3 », qui lui donne « plus de liberté ». Elle présente également l’émission « Pièces à conviction », magazine d’investigation diffusé une fois par mois en deuxième partie de soirée sur France 3. Depuis les attentats de janvier 2015 elle s’est enfin engagée auprès de collégiens, qu’elle rencontre une fois par mois pour discuter d’un fait d’actualité et les sensibiliser sur l’éducation aux médias et aux représentations qu’ils créent puis transmettent. Il est en effet nécessaire à ses yeux d’établir une « culture générale de l’actualité ».
Une fois son parcours présenté, Patricia Loison s’est prêtée avec plaisir et simplicité à une séance de questions/réponses. Presque toutes les questions tournaient autour d’un point central : l’image des journalistes et de leur métier. Patricia Loison voit les journalistes « comme des médecins », qui s’intéressent à avant tout à ce qui va mal « aux trains qui arrivent en retard », ce qui explique que de nombreuses initiatives pour la paix, ou encore artistiques et culturelles sont rarement mises en lumière. Nous avons ensuite beaucoup échangé sur la mauvaise image de la profession de journaliste dans les quartiers populaires. « On vient quand ça va pas » , « La banlieue est très mal traitée, sous-traitée sans doute » ajoute la journaliste. Il est nécessaire selon elle que les journalistes fassent preuve de davantage de curiosité et osent se rendre sur le terrain afin de mieux connaître et comprendre de ce dont ils traitent. Son éducation anglo-saxonne (Patricia Loison est née en Inde) lui a donné le goût du débat, de la polémique. Les journalistes français devraient selon elle poser une question jusqu’à obtenir une réponse pertinente, mais aussi faire preuve de plus d’insolence, d’une plus grande dose d’irrespect, qu’elle juge nécessaire afin de pouvoir traiter les problématiques politiques à fond. Elle a par ailleurs ajouté que la profession aurait grand intérêt à se diversifier. Beaucoup de journalistes sont en effet issus de milieux favorisés, ont pour une grande partie d’entre eux fait les mêmes écoles, Sciences-Po notamment ou l’ESJ. Autant dire qu’ils ne sont donc pas vraiment spécialistes des quartiers populaires qu’ils (mal)traitent régulièrement. Celle qui considère la création journalistique avant tout comme un « truc humain » évoque enfin le programme mis en place au sein de la rédaction de France 3 pour favoriser cette nécessaire diversité sociale. Elle considère comme une « responsabilité citoyenne » pour le journalisme « d’offrir des visages avec lesquels on peut représenter tout le monde ».
La séance s’est terminée, comme toujours, par un petit exercice pratique. Nous avons visionné un extrait du « Soir 3 » du 17 Mai, en portant une attention particulière aux choix des sujets et des titres, et l’ordre dans lequel ils étaient présentés. Une « actu chaude » était d’abord présentée, avec les manifestations contre la loi Travail, suivie de témoignages de policiers exprimant leur ras-le-bol face aux casseurs qui s’y invitent. L’émission revenait ensuite sur le « ça va mieux » de François Hollande, formule ensuite débattue sur le plateau en compagnie de deux « spécialistes » en économie : Etienne Lefèvre, rédacteur en chef des Echos , et Christophe Ramaux, maître de conférence à l’université Paris I. Cette édition se terminait par l’actualité du 66ème Festival de Cannes. Nous avons ainsi pu en savoir beaucoup sur la création d’un JT, dont le choix des titres et leur ordre est une composante essentielle. Que ce soit à la télé ou dans la presse, celui-ci doit répondre à différents critères : un nombre de caractères limités, une approche conforme à la couleur politique du média, plus particulièrement dans la presse écrite, et, si possible, un côté décalé ou amusant de manière à attirer le chaland.
Notre invitée a enfin prodigué quelques précieux conseils à ceux qui souhaitent devenir journaliste : « ne jamais lâcher » car « un journaliste qui lâche n’est pas un journaliste », « être curieux, déterminé » , « essayer d’entrer par la petite porte » en s’adressant par exemple à des radios de proximité et enfin garder précieusement le contact de ceux que l’on rencontre car « travailler son réseau c’est super important ». La persévérance serait donc la clé de la réussite.
Katia Nunes